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Lisette Lombé BLACK WORDS l'Arbre à paroles

Publié le par Claude Donnay

Lisette Lombé, BLACK WORDS

L’Arbre à paroles, coll. iF, 2018, 12 €

 

Surprenant mais beau recueil que ce « Black Words ».  Des textes plutôt longs, des slams, entrecoupés d’illustrations, dessins, photos, affiches mêlant collages et textes poétiques.  Un recueil qui met l’accent sur une certaine révolte, de femme d’abord, de femme de couleur ensuite, et finalement de femme d’aujourd’hui, car les textes sont bien inscrits dans la réalité présente – même si les références à d’autres périodes de l’Histoire transpirent de page en page – réalité des migrations, du racisme au quotidien, du sexisme, et tout cela dans une langue d’une musicalité succulente, dans la droite ligne de cette poésie orale, qui (re)fleurit partout depuis quelques années.

 

Lisette Lombé a été enseignante, jobcoach, mais est aussi animatrice d’ateliers de création et, avec son association L-SLAM, d’ateliers d’écriture et de coaching scénique.  La place de la femme est centrale dans son(ses) œuvre(s), la femme africaine, la femme métisse confrontée souvent à la discrimination, la femme libre en devenir, en espoir.  En ce sens l’écriture de Lisette Lombé est une écriture engagée, militante même.  Dans la postface du livre, l’auteure dit que ses « textes sont peuplés de personnages qui s’affranchissent des traditions et refusent les rôles qui leur sont assignés ». 

 

Mais il serait mal venu de réduire la poésie de Lisette Lombé à cette seule dimension de l’engagement, car c’est aussi une poésie très charnelle, où le corps prend une place essentielle, un corps érotisé parfois, un corps carrefour, « entre-deux », dans lequel la liberté peut s’exprimer en brisant les codes et les tabous.

« Le fait d’être métisse, ni blanche ni noire, et blanche et noire, influence ma vie », dit-elle, et le titre « Black Words » évoque lui-même une « performance métissée », dans laquelle l’érotisme voisine avec le slam ou la danse.

 

Recueil multi-facettes donc, qui donne envie d’une lecture à voix haute – on se surprend d’ailleurs à « vocaliser » certains textes comme cet extrait de « Marine » :

 

« On imite, on se moque, légers, farceurs, innocents.

On ne s’imagine pas qu’un jour on mourra en migrant,

Du sable dans les cheveux, du sable dans les yeux, du sable entre les dents.

On imite, on se moque, légers, farceurs, innocents.

On ânonne, on répète, on répète, on perroquète :

Bleu mer du sud, bleu ciel, bleu pastel, bleu azur, bleu acier,

Bleu pétrole, bleu cobalt, bleu France, bleu roy, bleu nuit,

Bleu marine. »

 

Avec « Black Words », Antoine Wauters, à travers sa collection iF, nous permet de lire un texte grisant, coloré, musclé et de découvrir une fois encore une voix aussi originale que captivante.

 

                                                                  Claude Donnay – mars 2018

 

 

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