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Anne-Lise BLANCHARD Les jours suffisent à son émerveillement

Publié le par Claude Donnay

Anne-Lise BLANCHARD, Les jours suffisent à son émerveillement », éditions unicité, 2018, 13 €

 

Le recueil d’Anne-Lise Blanchard me parle particulièrement, à moi qui écris souvent des textes hésitant entre poésie et narration, des textes où le phrasé emprunte autant au récit qu’au rythme du poème.

 

Autant vous le dire d’emblée, ce recueil m’a procuré l’ « émerveillement » promis dans le titre.  Sans déflorer le livre, on peut parler de cette mosaïque d’instantanés, de petites scènes et faits quotidiens, qui racontent une vie, celle de la narratrice et celle de sa famille, de l’amour qui les anime.  Passent les moments de l’enfance, de l’adolescence, de la maturité… Les amours, la maternité éblouissante, les regrets parfois, cette mélancolie qui saisit à la gorge quand on revisite le passé, l’enfance à jamais enfouie en nous. 

« …Dans le miroir elle reconnaît le lavage de bouche de son grand-père qu’elle regardait en silence il y a quarante ans. » (p.30)

 

Et le lecteur est embarqué dans cette magie du quotidien, des petits gestes, des moments précieux, qu’on enferme en soi comme des perles, dont la lumière brillera au fil des années.  Ainsi ce jour où, lors d’une randonnée en montagne, la petite famille emmenée par le père s’égare.  La nuit tombe, le refuge trop éloigné.  Hasard heureux, un abri à vaches.  Je vous livre la fin du texte :

« Ils sont assis autour du feu.  Ils l’ont allumé avec les feuillets d’un carnet humide et un briquet retrouvé dans la poche d’un pantalon mouillé au fond du sac.  Les flammes sont courtes.  Ils ont partagé le quignon de pain en quatre.  Le plus jeune repose la tête sur les cuisses de la mère.  Il suce une fois son pouce, une fois sa portion de pain.  Le père sort de l’abri à vaches.  Il a arrangé les sacs pour faire un matelas.  L’aîné tend au-dessus du feu son bout de pain piqué sur une branchette.  Il dit : Je crois que c’est encore mieux que le Club des cinq.  Le plus jeune se redresse : Moi j’aimerais passer toutes les vacances comme ça. »

 

Les moments rares s’enchaînent.  Il n’y a pas de temps mort dans la vie et tant de choses à voir, à vivre, de Noël et sa fête à la beauté du père jouant du piano, des paysages de la Drôme à Murighiol, de Meghri à Boulbon, la vie continue au fil des saisons et des rencontres. Et tout cela est magnifié par l’écriture tout en nuances d’Anne-Lise Blanchard, une écriture tissée d’images et de beauté simple.

« Ils sont silencieux dans leurs sourires » (p.52)

« Le ciel débusque de gros et noirs nuages » (p.36)

« Elle caresse les touches blanches qui ressemblent aux dents d’un lapin » (p.10)

 

Un très beau livre, précieux, de ceux qu’on emporte dans sa poche pour s’en délecter à petites bouchées gourmandes.

 

                                                                                      Claude Donnay

 Anne-Lise BLANCHARD, Les jours suffisent à son émerveillement », éditions unicité, 2018, 13 €

 

Le recueil d’Anne-Lise Blanchard me parle particulièrement, à moi qui écris souvent des textes hésitant entre poésie et narration, des textes où le phrasé emprunte autant au récit qu’au rythme du poème.

 

Autant vous le dire d’emblée, ce recueil m’a procuré l’ « émerveillement » promis dans le titre.  Sans déflorer le livre, on peut parler de cette mosaïque d’instantanés, de petites scènes et faits quotidiens, qui racontent une vie, celle de la narratrice et celle de sa famille, de l’amour qui les anime.  Passent les moments de l’enfance, de l’adolescence, de la maturité… Les amours, la maternité éblouissante, les regrets parfois, cette mélancolie qui saisit à la gorge quand on revisite le passé, l’enfance à jamais enfouie en nous. 

« …Dans le miroir elle reconnaît le lavage de bouche de son grand-père qu’elle regardait en silence il y a quarante ans. » (p.30)

 

Et le lecteur est embarqué dans cette magie du quotidien, des petits gestes, des moments précieux, qu’on enferme en soi comme des perles, dont la lumière brillera au fil des années.  Ainsi ce jour où, lors d’une randonnée en montagne, la petite famille emmenée par le père s’égare.  La nuit tombe, le refuge trop éloigné.  Hasard heureux, un abri à vaches.  Je vous livre la fin du texte :

« Ils sont assis autour du feu.  Ils l’ont allumé avec les feuillets d’un carnet humide et un briquet retrouvé dans la poche d’un pantalon mouillé au fond du sac.  Les flammes sont courtes.  Ils ont partagé le quignon de pain en quatre.  Le plus jeune repose la tête sur les cuisses de la mère.  Il suce une fois son pouce, une fois sa portion de pain.  Le père sort de l’abri à vaches.  Il a arrangé les sacs pour faire un matelas.  L’aîné tend au-dessus du feu son bout de pain piqué sur une branchette.  Il dit : Je crois que c’est encore mieux que le Club des cinq.  Le plus jeune se redresse : Moi j’aimerais passer toutes les vacances comme ça. »

 

Les moments rares s’enchaînent.  Il n’y a pas de temps mort dans la vie et tant de choses à voir, à vivre, de Noël et sa fête à la beauté du père jouant du piano, des paysages de la Drôme à Murighiol, de Meghri à Boulbon, la vie continue au fil des saisons et des rencontres. Et tout cela est magnifié par l’écriture tout en nuances d’Anne-Lise Blanchard, une écriture tissée d’images et de beauté simple.

« Ils sont silencieux dans leurs sourires » (p.52)

« Le ciel débusque de gros et noirs nuages » (p.36)

« Elle caresse les touches blanches qui ressemblent aux dents d’un lapin » (p.10)

 

Un très beau livre, précieux, de ceux qu’on emporte dans sa poche pour s’en délecter à petites bouchées gourmandes.

 

                                                        Claude Donnay 

 

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